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Au fil de mes abandons et de mes (nobles) révoltes
23 avril 2019

Pâques sanglante à la maison de retraite

Rat des villes et rat champs. Dans notre petite maison de retraite, les conflits sont latents entre anciens citadins et anciens ruraux, étrangers et locaux. Car leurs visions concernant la politesse s'opposent. En plus du grand âge, de la surdité, la vie de groupe en est rendue d'autant plus difficile que chacun défend sa conception des rapports humains.

Mme Bernèche, en bonne campagnarde, mais en fauteuil roulant, a décidé que les chocolats devaient être mangés avec mesure, sans aucun plaisir, car le campagnard se méfie du plaisir, cet objet non identifié en provenance des centres urbains, qui ne sert à rien, sauf à nourir une oisiveté tentatrice et dangereuse pour la survie de la communauté.

De son côté, Mme Fargela qui a perdu l'esprit mais qui sait très bien parler, en épicurienne de la Bourgogne, a entamé une OPA sur les chocolats de Pâques. Puisque personne ne veut les finir, elle se dévoue à la cause et ne cesse de se donner elle, du plaisir, devant le regard de plus en plus coléreux et envieux de Mme Bernèche. A la décharge de cette dernière, comme nombre de gourmands qui s'assument mal, elle est grosse, tandis que Mme Fargela avec tout le plaisir qu'elle se donne, est maigre. A mon avis, ceci expliquant cela. 

Or après moultes allusions inutiles et retours à la charge de Mme Fargela, Mme Bernèche excédée par la situation, finit par trancher dans le vif, et lui retire le plat d'office, sous prétexte que les sucreries ne lui appartiennent pas. Ils n'appartiennent pas plus à l'une qu'à l'autre, mais qu'importe. Elle a trouvé l'argument d'autorité qui met la discussion sous l'épée de Damoclès d'une confrontation ouverte, que Mme Fargela ne peut gagner, étant donné son caractère affable. Mme Bernèche, la placide et dure charentaise de la terre, s'est imposée. Elle retrouve la paix de l'esprit. Son monde  intérieur est en ordre. Quant à Mme Fargela, stoïque, elle mastique les quelques restes de chocolats qui lui sont restés collés aux dents, en attendant le dîner qui ne tardera pas.

Pour paraphraser un prêtre de ma connaissance lors d'une homélie : "Mais comment voulez-vous que le monde ne soit pas en guerre ?".    

paquesfinmin

 

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