Car un poème, ça s'écoute d'abord :

Cette époque est une époque d'infâmie pour les mots

Submergée d'avanies et de vaines menteries,

Fadeur de melon d'eau endormissant et stérile

Aseptisant le camembert de notre languerie

camembert

Epoque qui pleure, qui geint, qui finit

Par nous faire détester d'être un

Qui murmure et qui rit dans sa fange

Oh les rires de télé bêtes et pour rien,

Qui masquent le manque de cœur

Puis qui pleurent sur soi-même

Comme le ferait un chien

Je cherche parfois des humains

J'en rencontre même mais tout seul

Je porte un poids qui n'est pas le mien,

Médiocrité plus que tout, je te crains

S'il n'y a rien de mieux que les siens

C'est qu'il faut se choisir entre gueux.

Et nous devenons tous identiques

Au moment même où nous croyons naître uniques

Petits malgré nous et faisant notre mieux

Pleins de fiente notre gesticulation semble bien hasardeuse

Regardez-les ces profanes à la recherche de quelque dieu,

Attendant qu'il surgisse un être extraordinaire

Qui viendrait donner raison à leurs pensées rudimentaires

Ridicules ils se croient révolutionnaires

Il faudrait les lier au moins lier tous leurs chefs

Toutes ces folles et leurs chefs qui vivent carpe diem

Imaginer qu'un poème se fait au jour le jour !

Non, le choix d'un seul mot est un long accouchement,

Qui commence bien avant notre propre naissance

Il nous vient des poètes et des veines de la terre

Qui levèrent le nez la nuit vers l'univers

Attendant patiemment que Dieu entre en leur cœur

Puis grattant le papier sans raison bien des heures

Firent comme les autres durant des millénaires

Et tirèrent la moelle d'un langage vulgaire

Un mot puissant ne s'engendre pas d'une seule personne, ni en une seule fois, ni en une seule génération, ni sans inspiration

Il ne donne pas son suc au premier venu

Une armée de soumis lui léguèrent ses tripes

Pour qu'un seul génie puisse l'amener à vivre

Quand il fut né, il fut porté, il fut béni

Puis transmis précautionneusement d'oreilles en bouches

Pour parvenir par un miracle d'amour jusqu'à nous

Mais elles, elles ne voient rien

Diantre, je ne suis pas devin,

Mais le pire des imbéciles pour nous guider verrait plus loin

Les mots, s'attaquer aux mots, c'est s'attaquer au Verbe

C'est s'attaquer à Dieu

Au lieu de conception d'enfant, elle a dit conception.

Parce qu'on ne fait que créer aujourd'hui

Mais on ne regarde plus ce qu'on crée

C'est un enfant mais il est invisible

La créatrice donne vie

Qu'importe l'orgueil, le nom du fruit

Quand bien même elle serait devenue une putain,

D'ailleurs une putain, c'est mieux, ça use de son corps avec efficience

Ca fait ce que je veux, c'est libre de baiser

Et de faire payer ces cochons voluptueux

Bêtes avides et sanguines qui travaillent inutiles.

Inconséquents, je les trouve inconséquents, utilisant de pauvres mots qui leur ressemble

Ils ont disparu avec en jetant leurs mots, il n'en sortira rien

Inutiles leurs mots sont inutiles et plats et laids,

Comme les hommes non imprégnés du passé ce sont des plaies

A quoi ça sert un mot si ce n'est que verbiage ?

Sans certains mots précis, les monstres n'ont plus leur chance

Ils restent des monstres, ils ne rencontrent pas d'autres monstres,

Ils ne deviennent pas moins monstres

Si les mots ce n'est pas sérieux plus rien n'est sérieux

Si les mots ne font pas sérieusement rire, le rire est niaiserie

Sans cela c'est fonction phatique

C'est télévision

Ah ! Horreur des dialogues dans les films

Horreur ces vies comme des fumées maigres et volages

Qui croient découvrir tout et qui n'inventent pipe

Horreur ces exemples qui n'en sont pas

Qui se veulent être nous et ne nous apportent pas

Honteux ces gens qui veulent rester dans le sein de la créatrice

Et surtout "être compris"

Est-ce qu'un génie veut écrire comme celui qui le lit ?

Hideux ces artistes qui de rien ne désire

Qui flattent la vérole de tous leurs complices

Dans mon élan de haine encore trop monstre, je parlerai du paresseux

Le cul dans ses yeux, il veut bien du plaisir

S'il doit recevoir et être mort à la vie

Et le consensuel ce salopard et sa gamelle

Celui-là il se pique de penser à bon compte

Comme si la vérité était éprise de politesse

Et le faux moderne, cynique au possible

Dont la seule ambition est de tromper son monde

Il ne trompe personne et finit dans l'oubli

Et le dégoulinant, celui-là je crois a la palme de notre temps,

Il voudrait faire du bien, il est prêt à aider

Il pleure sur soi, il se croit tout sensible

Et laissera crever son père dans n'importe quel lit

Oui je vous hais parce que vous êtes devenu haïssables

Des raclures pour les vers et les miens sont très gras

Plein de tout ce qu'il faut, plein de tous vos alois

Vous vous croyez modernes, vous ne faîtes que survivre

Cerveau programme suivre

Capables de travestir l'essence de n'importe quel mot

Et d'en faire à vos fins des armes assassines

Ah ça vous n'en manquez pas !

Dire "je t'aime, je suis là", pas de ça chez moi

"La morale, je suis quoi ? Responsable de mes actes, certainement pas"

Ils veulent vivre ces caprins, non ils veulent acheter

Se nourrir à la mamelle éternelle de lait

Des animaux je vous dis et encore,

Des espèces les surpasse et de loin

Laids laids vous êtes laids et je vous hais

Car sans vous je ne puis être beau.

Mais aimez bon sang, aimez, aimez moi au moins avec mes différences !

Usez de votre cerveau pour de belles pensées

Il le faut : arrêtez d'être armés.

Petits enfants, vous êtes sans espoir

Enfermés pour toujours dans vos manques de confiance

Persuadés de savoir et parfaits dans vos vices

Vous ne vous trompez pas en restant en silence.

Une âme se meurt enfermée dans des murs

Et revient à la vie quand elle nage à l'air libre

Votre vie c'est une bouche et votre bouche c'est un cœur

Je saurai qu'ils vivent quand je les verrai se battre

Et non pas pleurnicher contre des scélérates

Vous n'êtes pas des palourdes mais des êtres trop humains

Vous croyez en vous ? vous serez morts demain.

Prenez plutôt un mot au début de votre vie

Et portez le jusqu'à la fin donnez le ainsi

A une personne que vous aimez quand finira la bougie

Remettez le lui en lui soufflant ceci

De nombreuses années j'ai distillé dans ce précis

Un élixir de lettres qu'en mon existence entière j'ai chéri

Je te le remets prends en grand soin mon ami

Tends ton oreille je te le souffle et glissez lui

Ce mot c'est

(Poème) Le camembert de la langue

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